pour dĂ©couvrir la page dĂ©diĂ©e Ă Sri Aurobindo, MĂšre et Satprem avant lecture Table des MatiĂšres PrĂ©face Ă la deuxiĂšme Ă©dition PrĂ©face Ă la troisiĂšme Ă©dition Introduction 1. Un Occidental accompli 2. La Loi Ă©ternelle 3. Fin de lâintellect 4. Le silence mental Les constructions mentales MĂ©ditation active Transition Descente de la Force Emergence dâun nouveau mode de connaissance Le mental universel Les centres de conscience La personnalitĂ© frontale Lâindividualisation de la conscience Conscience-Force, Conscience-Joie 6. La pacification du vital Limites de la morale Lâhabitude de rĂ©pondre Les forces adverses Le vital vrai 7. Le centre psychique La naissance psychique La croissance psychique Ă partir de lĂ prĂ©sentation sur 2iĂšme page _________________________________________________________________________ SRI AUROBINDO Ou lâaventure de la conscience PrĂ©face Ă la 2Ă© Ă©dition 27 janvier 1970 1. Le rĂšgne de lâaventure est terminĂ©. Sur terre, nous savons bien que le temps des Cortez et des Pizarre est fini. La mĂȘme mĂ©canique nous enserre, la souriciĂšre se referme. Nous sommes donc mis au pied du mur, devant le dernier terrain quâil nous reste Ă explorer, lâultime aventure nous-mĂȘmes. Il faut dĂ©boucher ailleurs. Mais il y a toutes sortes d'âailleursâ. Ceux de la drogue sont semĂ©s de danger et surtout ils dĂ©pendent dâun moyen extĂ©rieur. Ceux de la psychanalyse manquent du levier de conscience qui permet dâaller oĂč lâon veut, en maĂźtre et non en tĂ©moin impuissant ou en victime maladive. Ceux de la religion sont plus illuminĂ©s mais ils dĂ©pendent aussi dâun dieu ou dâun dogme, et surtout ils nous enferment dans un type dâexpĂ©rience car on peut aussi bien et davantage, ĂȘtre prisonnier des mondes ailleurs que du monde ici. 2. Finalement la valeur dâune expĂ©rience se mesure Ă son pouvoir de transformation de la vie, sinon nous sommes devant un vain rĂȘve ou une hallucination. Or, Sri Aurobindo nous fait faire une double dĂ©couverte dont nous avons un besoin urgent si nous voulons transformer notre monde. En suivant pas Ă pas sa prodigieuse exploration â sa technique des espaces intĂ©rieurs â nous sommes amenĂ©s Ă la plus grande dĂ©couverte de tous les temps, Ă savoir que la conscience est un pouvoir. Nous pouvons mieux que nos machines et que cette Ă©norme MĂ©canique qui nous Ă©touffe si nous voulons descendre dans notre propre coeur comme des explorateurs mĂ©thodiques, rigoureux et lucides. Satprem â PrĂ©face Ă la 3iĂšme Ă©dition 31 janvier 2003 La Loi de la Terre loi de la Terre une loi de BeautĂ© et de VĂ©ritĂ©. Peut-ĂȘtre y a-t-il une autre Sagesse et une autre Source et une Terre nouvelle du quaternaire sous nos dĂ©combres dâanthropoĂŻdes attardĂ©s qui nâont pas fini de pousser. Une maniĂšre dâĂȘtre nouvelle. âUn autre ĂȘtre sur la terreâ, disait Sri Aurobindo. La derniĂšre Aventure. Satprem INTRODUCTION _____________ Depuis un demi siĂšcle dĂ©jĂ , la psychologie nâa cessĂ© de rĂ©intĂ©grer les dĂ©mons dans lâhomme; il se pourrait comme lâavait pensĂ© Malraux, que la tĂąche du prochain demi-siĂšcle soit dây rĂ©intĂ©grer les dieux ou plutĂŽt comme le voulait Sri Aurobindo, de rĂ©intĂ©grer lâEsprit dans lâhomme et la matiĂšre et de crĂ©er la vie divine sur terre. Il y a bien des façons de se mettre Ă lâOeuvre ; en fait nous avons chacun notre ouverture particuliĂšre pour lâun, ce sera une piĂšce bien ouvrĂ©e, pour lâautre une belle idĂ©e, pour dâautres une page de musique, une riviĂšreâŠ. toutes sont des maniĂšres de respirer dans lâInfini. Il y a un Sri Aurobindo philosophe, un Sri Aurobindo poĂšte quâil fut essentiellement, un visionnaire de lâĂ©volution. Il y a aussi un Sri Aurobindo explorateur qui Ă©tait yogi aussi. Nâa-t-il pas dit que le yoga est lâart de la dĂ©couverte consciente de soi ? Câest cette exploration que nous voudrions entreprendre avec lui. Il nây a pas de raison quâun jour la fenĂȘtre ne sâouvre pas qui nous ensoleillera pour toujours. A vrai dire, ce nâest pas une mais plusieurs fenĂȘtres qui sâouvrent tour Ă tour chaque fois sur un espace plus vaste. Câest un changement de conscience aussi radical que le passage du sommeil Ă la veille. Aurobindo nâest pas seulement lâexplorateur de la conscience, câest un bĂątisseur dâun monde nouveau. Il a dĂ©couvert un autre monde quâil a appelĂ© le Supramental et quâil a voulu tirer sur terre. Le Supramental, nous dit Sri Aurobindo, est le changement de conscience qui aura le pouvoir de transformer notre monde matĂ©riel aussi profondĂ©ment et durablement que le Mental ne lâa fait lorsquâil apparut dans la MatiĂšre. Nous verrons donc comment le yoga intĂ©gral dĂ©bouche sur un yoga supramental ou yoga de transformation terrestre que nous tenterons dâesquisser car lâhistoire est en train de se faire et nous ne savons pas encore trĂšs bien oĂč elle nous mĂšnera ni mĂȘme si elle rĂ©ussira. Au fond, cela dĂ©pend un peu de nous tous. 1 Un Occidental accompli ________________________ p18-p24 Aurobindo est proche de nous, lâOccident, lĂ oĂč il a passĂ© ses annĂ©es de formation de sept Ă vingt ans. Il est nĂ© le 15 juin 1872 Ă Calcutta, lâannĂ©e des illuminations de Rimbaud ; le docteur Krishnadhan Ghose a fait ses Ă©tudes de mĂ©decine en Angleterre et il ne souhaitait pas que ses trois fils soient contaminĂ©s par le mysticisme âfumeux et rĂ©trogradeâ oĂč son pays semblait se dĂ©labrer. Il ne voulait pas quâils connussent rien des traditions ni des langues de lâInde. Sri Aurobindo fut donc dâabord Ă©levĂ© par une gouvernante anglaise puis expĂ©diĂ© Ă lâĂąge de cinq ans dans une Ă©cole de nonnes irlandaises Ă Darjeeling. Deux ans plus tard, les trois fils Ghose partaient pour lâAngleterre. Sri Aurobindo a sept ans. Il ne reverra pas son pĂšre qui mourut juste avant son retour en Inde. Sri Aurobindo et ses deux frĂšres furent confiĂ©s Ă un pasteur anglais de Manchester Ă la condition quâils ne fissent la connaissance dâaucun indien et ne subissent aucune influence indienne. Au cours de ses premiĂšres annĂ©es Ă Manchester Sri Aurobindo apprit le français, lâanglais Ă©tant dĂ©jĂ sa langue maternelle. Le poĂšte sâĂ©tait Ă©veillĂ© en lui. La mĂšre du pasteur essaya de sauver cette Ăąme hĂ©rĂ©tique mais Sri Aurobindo ne devait jamais ĂȘtre un homme religieux pas plus en Inde quâen Occident la vraie thĂ©ocratie, Ă©crira-t-il plus tard, est le royaume de Dieu dans lâhomme, non le royaume dâun pape, dâune Eglise ou dâune classe sacerdotale. A douze ans il sait dĂ©jĂ Ă fond le latin et le français. Le directeur de St. Paul School va lui donner lui-mĂȘme des leçons de grec. Il dĂ©vore les poĂštes français et bientĂŽt toute la pensĂ©e europĂ©enne. Il sut vite suffisamment dâitalien et dâallemand pour lire Dante et Goethe dans le texte. Sri Aurobindo humoriste est peut-ĂȘtre plus important que Sri Aurobindo philosophe car il considĂ©rait que lâhumour participait Ă lâessence mĂȘme de son ĂȘtre alors que la philosophie comme la poĂ©sie relevaient dâautres langages. DĂšs sa premiĂšre annĂ©e au Kingâs College il ramasse tous les prix de poĂ©sie grecque et latine. LâindĂ©pendance de lâInde le hante et en tant que secrĂ©taire de lâassociation des Ă©tudiants de Cambridge il prononce des discours rĂ©volutionnaires qui ne lâempĂȘche pas de passer une licence de lettres classiques. A vingt ans il sâembarque pour lâInde. 2 La Loi Ă©ternelle ________________ p25-p36 prolĂ©tariat est enfoncĂ© dans lâignorance et Ă©crasĂ© de dĂ©tresse ! sâĂ©crie Sri Aurobindo Ă peine dĂ©barquĂ© en Inde. Câest un problĂšme dâaction qui se pose Ă lui. Nous sommes au monde pour agir, sera le point de vue qui restera en lui jusquâĂ ses plus hautes rĂ©alisations yogiques. Quâallait apporter lâInde Ă Sri Aurobindo ? Elle est un monde indĂ©finissable oĂč âlâhindouismeâ nâexiste pas car lâInde est le pays dâune immense libertĂ© spirituelle. Lââhindouismeâ est une invention occidentale. Lâindien dit seulement âla loi Ă©ternelleâ, sanĂątana dharma. Ce qui semble le plus important dans une religion pour un occidental câest sa structure qui la distingue dâune autre. Pour lâindien câest la moins importante car il cherche instinctivement le point central oĂč tout communique. Câest autre chose quâune tolĂ©rance, câest la comprĂ©hension positive que chaque homme a un besoin intĂ©rieur quâon appelle Dieu ou dâautres façons et que chaque homme a besoin dâaimer ce quâil comprend de Dieu. âTels les hommes viennent Ă Moi, tels je les accepte. Câest mon chemin que les hommes suivent de tous cĂŽtĂ©sâ dit la GĂźtĂą Sri Aurobindo Ă©crira bientĂŽt â La perfection du yoga intĂ©gral viendra quand chaque homme sera capable de suivre son propre chemin de yoga et de travailler au dĂ©veloppement de sa propre nature dans sa poussĂ©e vers ce qui transcende toute nature. Car la libertĂ© est la loi finale et lâultime accomplissement.â Lâindien ne dit jamais âCroyez-vous en un Dieu ?â. Il dit simplement âFaites lâexpĂ©rience;â. Si vous faites ceci, vous arriverez lĂ et si vous faites telle autre chose, vous arriverez Ă tel autre rĂ©sultat. Toute lâingĂ©niositĂ© que nous avons dĂ©ployĂ©e depuis un siĂšcle ou deux Ă lâĂ©tude des phĂ©nomĂšnes physiques, lâindien lâa mise avec une rigueur Ă©gale, depuis quatre ou cinq millĂ©naires, Ă lâexamen des phĂ©nomĂšnes intĂ©rieurs. Si lâon veut progresser dans lâĂ©tude des phĂ©nomĂšnes intĂ©rieurs il ne suffit pas de lire des livres mais il faut payer de sa personne. LâInde nous renvoie sagement Ă lâexpĂ©rience directe et aux mĂ©thodes dâexpĂ©rience. LâIndien plonge ses racines en dâautres mondes, il nâest pas tout Ă fait dâici, qui est pour lui une façon de vivre parmi beaucoup dâautres façons en marge dâimmenses continents par derriĂšre. Il est conscient de grands rythmes psychiques qui excĂšdent la brĂšve pulsation dâune vie humaine unique. Il nây a rien Ă rejeter nulle part, pas plus dans ledit hindouisme que dans le christianisme ou dans nâimporte quelle autre aspiration de lâhomme mais il y a tout Ă Ă©largir, Ă Ă©largir sans fin. Ce que nous prenons pour une vĂ©ritĂ© ultime nâest le plus souvent quâune expĂ©rience incomplĂšte de la VĂ©ritĂ©. Et sans doute, la totalitĂ© de lâExpĂ©rience nâexiste nulle part dans le temps et lâespace en aucun ĂȘtre si lumineux soit-il, car la VĂ©ritĂ© est infinie, elle va toujours de lâavant. La Loi Ă©ternelle, oui, mais Ă©ternellement jeune et Ă©ternellement progressive. LâInde est devant une contradiction bien surprenante oĂč il est dit âTout est Brahmanâ, rien nâest en dehors de Lui. Et puis il y a ce Brahman transcendant, immobile, Ă jamais hors de la vie, de la terre, qui fait dire Ă Shankara â Brahman est vrai, le monde est illusionâ ou dans la Niralamba Upanishad â Brahman est vrai, le monde est un mensongeâ. Si nous laissons de cĂŽtĂ© les Ecritures, la contradiction devient plus flagrante encore. La psychologie indienne se fonde sur une observation que tout dans lâunivers est composĂ© de trois qualitĂ©s ou guna. Tamas, lâinertie, lâobscuritĂ©, lâinconscience, rajas, le mouvement, la lutte, lâeffort, la passion et sattva, la lumiĂšre, lâharmonie, la joie. Nulle part ces trois Ă©lĂ©ments nâexistent Ă lâĂ©tat pur. Dans le plus noir tamas, la lumiĂšre brille aussi. Les diverses disciplines indiennes cherchent donc Ă rĂ©tablir lâĂ©quilibre sortir du jeu des trois guna qui nous ballottent sans fin et prendre position au-dessus, câest Ă dire retrouver la conscience divine yoga. A cette fin, elles visent toutes Ă nous sortir de lâĂ©tat de dispersion et de gaspillage dans lequel nous vivons et Ă produire en nous une concentration suffisante pour basculer dans un autre Ă©tat. Ce travail de concentration peut sâeffectuer Ă nâimporte quel niveau physique, vital, mental. Suivant le niveau, nous pratiquons donc tel ou tel yoga hatha yoga, raja yoga, mantra yoga et beaucoup dâautres. Le critĂšre de la rĂ©ussite est un Ă©tat de transe ou dâextase yogique, samĂądhi. Entre la fin de lâĂąge des mystĂšres et lâapparition des grandes religions, une faille sâest creusĂ©e. Une connaissance sâest voilĂ©e qui ne faisait pas cette formidable distinction entre Dieu et le monde. Le conflit entre la MatiĂšre et lâEsprit est une crĂ©ation moderne. Entre les premiĂšres Upanishads dâil y a quelques trois ou quatre mille ans, elle mĂȘme hĂ©ritiĂšres des VĂ©das qui voyaient Dieu partout dans ce merveilleux univers et les derniĂšres Upanishads, un Secret sâest perdu. Il sâest perdu non seulement en Inde mais aussi en MĂ©sopotamie, en Egypte, en GrĂšce, en AmĂ©rique centrale. Câest ce secret que Sri Aurobindo allait redĂ©couvrir. La vĂ©ritĂ© une, Ă©ternelle et immuable, est lâEsprit et sans lâEsprit, la vĂ©ritĂ© pragmatique de lâunivers nâaurait pas dâorigine ni de fondement ; le monde serait dĂ©pourvu de sens, vide de direction intĂ©rieure. Les vĂ©ritĂ©s de lâEsprit se jettent dans le Devenir ici bas dissonances, variations, explorations des possibles, rĂ©versions, perversions et conversions ascendantes en un motif harmonique toujours plus haut. Câest Lui-mĂȘme le crĂ©ateur et lâĂ©nergie de crĂ©ation, la cause et la mĂ©thode et le rĂ©sultat des opĂ©rations, la musique et le musicien, le poĂšte et le poĂšme. Lui-mĂȘme le Supramental, le mental, la vie et la matiĂšre, lâĂąme et la nature. Mais il ne suffisait pas Ă Sri Aurobindo de rĂ©concilier sur le papier lâEsprit et la MatiĂšre. La VĂ©ritĂ© et la Connaissance sont un vain rayon si la Connaissance nâapporte le pouvoir de changer le monde. Le Secret perdu câest le pouvoir de lâEsprit sur la MatiĂšre. Câest ce secret pragmatique que Sri Aurobindo allait peu Ă peu retrouver expĂ©rimentalement en ayant le courage , Ă la fois, de sauter par-dessus sa culture occidentale et par-dessus la tradition religieuse hindoue, tant il est vrai que lâessentiel Ă©merge quand on a tout oubliĂ©. 3 Fin de lâintellect ________________ p37-p42 avait fallu 13 ans Ă Sri Aurobindo pour parcourir le chemin occidental ; il lui en faudra presque autant pour parcourir le chemin de lâInde et parvenir au âsommetâ des rĂ©alisations yogiques traditionnelles, câest Ă dire au commencement de son propre travail. Le premier secret de Sri Aurobindo est sans doute dâavoir toujours refusĂ© de couper la vie en deux actions, intĂ©rieur, extĂ©rieur. Du jour oĂč il a pensĂ© au yoga il a mis tout dedans haut et bas, dedans et dehors, tout lui Ă©tait bon. Lorsquâil dĂ©barque sur lâApollo Bunder Ă Bombay, une expĂ©rience spirituelle spontanĂ©e le saisit, un calme immense sâempare de lui. Sri Aurobindo a vingt ans, il se trouve une place auprĂšs du Maharaja de Baroda comme professeur de français, puis dâanglais au collĂšge de lâĂ©tat. Il fait de nombreux voyages Ă Calcutta. Il Ă©crit des articles dans lesquels il invite ses compatriotes Ă secouer le joug. Son but est dâorganiser toutes les Ă©nergies de la nation en vue dâune action rĂ©volutionnaire. Nous sommes en 1893 et lâhĂ©gĂ©monie britannique sâĂ©tend sur les trois quarts du globe. Il se met Ă lâaction secrĂšte et pendant treize ans Sri Aurobindo va jouer avec le feu. Il est encore sur sa lancĂ©e occidentale et câest par caisses quâil dĂ©vore les romans anglais, russes, allemands, français mais aussi les textes sacrĂ©s de lâInde, Upanishads, RĂąmĂąyana, GĂźtĂą sans quâil mĂźt jamais les pieds dans un temple, sauf en curieux. ll se mit aussi Ă lâĂ©tude du sanskrit quâil apprit seul et il dĂ©couvrit quelques annĂ©es plus tard le sens perdu des VĂ©das. LâĂ©poque vĂ©dique, antĂ©rieure Ă celle des Upanishads se situe au delĂ du quatriĂšme millĂ©naire avant Sri Aurobindo arrive Ă un tournant les temples ne lâintĂ©ressent pas et les livres sont vides. Un ami lui conseille le yoga. Sri Aurobindo refuse car âun yoga qui exige que jâabandonne le monde nâest pas fait pour moi,â dit-il. Mais un jour, Sri Aurobindo est le tĂ©moin dâune scĂšne curieuse au cours de laquelle son jeune frĂšre Barin, attaquĂ© par une mauvaise fiĂšvre, est sauvĂ© par une intervention dâun moine errant Ă demi-nu, un naga-sannyasin. Il avise que le yoga peut servir Ă autre chose quâĂ sâĂ©vader. Câest ainsi que Sri Aurobindo se mit en route. 4 Le Silence mental _________________ p43-p62 Les constructions mentales p43-p44 premiĂšre Ă©tape est le silence mental. Il sâapercevra quâil vit dans un vacarme sournois, un tourbillon Ă©puisant oĂč il nây a place que pour ses pensĂ©es, ses sentiments, ses impulsions, ses rĂ©actions. En un sens, nous ne sommes rien dâautre quâune masse complexe dâhabitudes mentales, nerveuses et physiques, liĂ©es ensemble par quelques idĂ©es directrices, dĂ©sirs, associations. Le premier travail du yoga, câest de respirer au large et naturellement de briser cet Ă©cran mental qui ne laisse filtrer quâun seul type de vibration, pour connaĂźtre lâinfinitude multicolore des vibrations, câest Ă dire le monde enfin et les ĂȘtres tels quâils sont. MĂ©ditation active p45-p47 on sâassoit les yeux clos pour faire le silence on est tout dâabord submergĂ© par un torrent de pensĂ©es qui surgissent de partout. Il ne faut surtout pas commettre lâerreur de lutter contre le mental. Il faut dĂ©placer le centre, par exemple en suivant sa respiration ou en se concentrant sur une image. Chacun sa mĂ©thode. Le yoga Ă©veille automatiquement par le seul fait que lâon sâest mis en route toute une gamme de facultĂ©s latentes et de forces invisibles qui dĂ©bordent les possibilitĂ©s de notre ĂȘtre extĂ©rieur et qui peuvent faire pour nous ce que nous sommes incapables de faire. Mais les exercices de mĂ©ditation ne sont pas la vraie solution du problĂšme bien quâils soient nĂ©cessaires au dĂ©but pour donner lâimpulsion. Nous avons besoin dâune vie complĂšte, nous avons besoin de vivre la vĂ©ritĂ© de notre ĂȘtre, tous les jours, Ă chaque instant et pour cela les mĂ©ditations bĂ©ates ne sont pas la solution. La seule solution est donc de pratiquer le silence mental lĂ oĂč il est apparemment le plus difficile, câest Ă dire dans la rue, au travail, partout. On travaille sur soi Ă chaque instant et la vie commence Ă prendre un intĂ©rĂȘt tout Ă fait inusitĂ©. Les moindres petites circonstances deviennent lâoccasion dâune victoire. Nous sommes orientĂ©s. Le yoga nâest pas une maniĂšre de faire mais une maniĂšre dâĂȘtre. Transition p47-p49 sommes en quĂȘte dâune autre pays mais entre celui que nous quittons et celui qui nâest pas encore lĂ il y a un no manâs land assez pĂ©nible. Câest une pĂ©riode dâĂ©preuve. LâĂ©preuve principale est le vide intĂ©rieur. Le monde apparaĂźt Ă©normĂ©ment absurde. Câest le signe dâun commencement dâintĂ©riorisation. Il ne faut pas sâenfermer dans une fausse profondeur. Il faut aller plus loin. Quand on a commencĂ© le yoga il faut aller jusquâau bout. Le chercheur doit comprendre quâil commence Ă naĂźtre Ă autre chose. Câest le passage Ă une nouvelle conscience. Notre seule ressource est alors de nous accrocher Ă notre aspiration et de la faire grandir, grandir justement par ce terrible manque de tout. Simplement, nous avons la foi inĂ©branlable que derriĂšre ce passage il y a une porte qui sâouvre. La foi, dit Sri Aurobindo, est une intuition qui non seulement attend lâexpĂ©rience pour ĂȘtre justifiĂ©e mais qui conduit Ă lâexpĂ©rience. Descente de la force p49-p53 peu Ă peu le vide sâemplit. On fait alors une sĂ©rie dâobservations et dâexpĂ©riences dâune importance considĂ©rable. On sâaperçoit que tout est possible et surtout quâil nây a pas deux cas semblables, dâoĂč lâerreur de tous les dogmatismes spirituels. On sent autour de la tĂȘte, sur la nuque, une pression. Celle-ci devient continue et donne la sensation trĂšs agrĂ©able dâune Ă©nergie fraĂźche. Vraiment, on a plongĂ© dans la Source et cette force descendante est la force mĂȘme de lâEsprit â Shakti. Quand ils parlent de leur expĂ©rience les disciples de PondichĂ©ry disent â la Force de Sri Aurobindo et de la MĂšreâ. Cette manifestation constitue la diffĂ©rence fondamentale entre le yoga intĂ©gral de Sri Aurobindo et les autres yogas. Dans dâautres mĂ©thodes, on a lâexpĂ©rience dâune force ascendante appelĂ©e Kundalini qui sâĂ©veille assez brutalement dans notre ĂȘtre jusquâĂ atteindre le sommet du crĂąne oĂč elle semble Ă©clore dans une sorte de pulsation lumineuse qui sâaccompagne dâune sensation dâimmensitĂ©. les procĂ©dĂ©s yogiques que nous pourrions appeler thermogĂ©nĂ©rateurs asana du hatha yoga, concentrations du raja yoga exercices respiratoires ou prĂąnĂąyĂąma etc⊠visent Ă lâĂ©veil de cette force ascendante. Les yogas traditionnels visent Ă une libĂ©ration de la conscience, Ă Ă©merger vers le haut dans la paix ou lâextase. Notre expĂ©rience du courant descendant est lâexpĂ©rience de la Force transformatrice. Câest elle qui fera le yoga pour nous, automatiquement et pourvu quâon laisse faire. Elle commencera par oĂč finissent les autres yogas puis descendra de niveau en niveau et câest Elle qui universalisera notre ĂȘtre tout entier. Câest lâexpĂ©rience de base du yoga intĂ©gral. Emergence dâun nouveau mode de connaissance p53-p57 le silence mental, un autre phĂ©nomĂšne se produit, fort important, qui sâĂ©tend parfois sur de nombreuses annĂ©es, câest ce que nous pouvons appeler lâĂ©mergence dâun nouveau mode de connaissance et donc dâun nouveau mode dâaction. LâexpĂ©rience nous apprend quâil nâest pas nĂ©cessaire de rĂ©flĂ©chir, de nous souvenir, de chercher, de faire toute sorte de mĂ©canismes mentaux. Au fond le yoga nâest pas tant une façon dâapprendre que de dĂ©sapprendre une foule dâhabitudes que nous avons hĂ©ritĂ©es de notre Ă©volution animale. Le chercheur finira par sentir quelque chose qui vit au fond de lui, Ă lâarriĂšre plan de son ĂȘtre, comme une petite vibration sourde. Il lui suffira de prendre un peu de recul dans sa conscience pour quâĂ nâimporte quel moment la vibration de silence soit retrouvĂ©e. BientĂŽt cette vibration deviendra de plus en plus perceptible et le chercheur sentira une sĂ©paration qui sâopĂšre dans son ĂȘtre une profondeur silencieuse qui vibre. Il aura dĂ©couvert le TĂ©moin en lui et se laissera de moins en moins accaparer par le jeu extĂ©rieur qui sans cesse tente de nous avaler. Ce travail de dĂ©crochage sera puissamment assistĂ© par lâexpĂ©rience de la Force descendante qui exercera une pression silencieuse. Peu Ă peu nous nous apercevons quâil nâest pas nĂ©cessaire de rĂ©flĂ©chir et que quelque chose par derriĂšre fait toute la besogne avec une prĂ©cision de plus en plus grande. Nous verrons que plus nous obĂ©irons Ă ces suggestions-Ă©clair, plus elles tendront Ă devenir frĂ©quentes, claires et impĂ©rieuses. Nous avons tous fait lâexpĂ©rience de ces problĂšmes mystĂ©rieusement rĂ©solus dans le sommeil, prĂ©cisĂ©ment quand la machine Ă penser sâest tue. Puis, un jour, Ă force dâerreurs, nous aurons compris que le mental nâest pas un instrument de connaissance mais seulement un organisateur de la connaissance et que la connaissance vient dâailleurs. Câest vraiment une autre façon de vivre, trĂšs allĂ©gĂ©e. Il nâest rien que le mental fait qui ne puisse se faire et se faire mieux, dans lâimmobilitĂ© mentale et une tranquillitĂ© sans pensĂ©e. Le mental universel p57-p62 prĂ©sent nous avons analysĂ© les progrĂšs du chercheur en termes intĂ©rieurs mais ce progrĂšs se traduit Ă©galement sur le plan extĂ©rieur. Dâailleurs la cloison intĂ©rieur-extĂ©rieur sâamenuise de plus en plus et apparaĂźt comme une convention artificielle. Il y aura tout dâabord des symptĂŽmes dĂ©sagrĂ©ables car il recevra les pensĂ©es des gens, leurs volontĂ©s, leurs dĂ©sirs, sous leur vĂ©ritable aspect et toute leur nuditĂ©, comme ils sont vraiment- des attentats. Notons que les âmauvaises pensĂ©esâ ne sont pas seules Ă partager cette virulence. Rien nâest plus agressif que les bonnes volontĂ©s, les bons sentiments, les altruismes. Dâun cĂŽtĂ© ou de lâautre, câest lâego qui se nourrit par la force ou la douceur. Nous ne sommes civilisĂ©s quâĂ la surface, dessous, le cannibale continue. ArmĂ© de sa force et de son silence mental le chercheur verra quâil est permĂ©able au dehors et quâil reçoit de partout. Il semble donc quâavec le silence mental un Ă©largissement de la conscience se soit produit et quâelle puisse se diriger Ă volontĂ© en nâimporte quel point de lâuniverselle rĂ©alitĂ© pour y connaĂźtre ce quâelle a besoin de connaĂźtre. Dans cette transparence silencieuse nous ferons une autre dĂ©couverte capitale par ses implications. Nous nous apercevrons que les pensĂ©es des gens nous viennent de lâextĂ©rieur mais que nos propres pensĂ©es nous viennent aussi du dehors. Lorsque nous serons suffisamment transparents nous pourrons sentir, dans le silence immobile du mental comme des petits remous, de lĂ©gĂšres vibrations et si nous acceptons lâentrĂ©e en nous de celles -ci nous sommes soudain en train de penser Ă quelque chose. Un bon lecteur de pensĂ©e peut saisir ce qui se passe dans une personne dont il ne connaĂźt mĂȘme pas la langue car ce sont des vibrations auxquelles il donne la forme mentale correspondante. Lâhomme sâest habituĂ© Ă sĂ©lectionner dans le Mental universel un certain type de vibration, assez rĂ©duit, avec lequel il est en affinitĂ© et jusquâĂ la fin de sa vie il accrochera la mĂȘme longueur dâonde. Il tourne et tourne dans la cage. Certes, nous changeons dâidĂ©e mais changer dâidĂ©e nâest point progresser, ce nâest pas sâĂ©lever Ă un mode vibratoire plus haut. Câest pourquoi Sri Aurobindo parlait de changement de conscience. Le chercheur dĂ©couvre ainsi quâil nây a pas de dedans et de dehors et que ce dernier est partout dedans ! Nous sommes partout ! Nous sommes partout chez nous. De mĂȘme pour lâantinomie action-mĂ©ditation la Force passe en nous et nous ne sommes jamais branchĂ© ailleurs. 5 La Conscience ______________ p63-p80 un occidental, la conscience est toujours un phĂ©nomĂšne mental je pense donc je suis. Câest un point de vue, le nĂŽtre. Nous nous plaçons au centre du monde. Pourtant si nous voulons dĂ©couvrir ce quâest la conscience il faut passer outre Ă cet Ă©troit point de vue. Sri Aurobindo avait pu faire les observations suivantes La conscience mentale nâest quâune gamme humaine et elle nâĂ©puise pas toutes les gammes de conscience possibles de mĂȘme que la vue humaine nâĂ©puise pas toutes les gradations de couleur ou lâouĂŻe toutes les gradations du son car il y a quantitĂ© de choses qui sont invisibles et inaudibles Ă lâhomme. De mĂȘme il y a des gammes de conscience au dessus â gammes supramentales â et au dessous â gammes submentales â avec lesquelles lâĂȘtre humain normal nâa pas de contact et qui, de ce fait, lui semblent âinconscientesâ. A mesure que nous progressons et que nous nous Ă©veillons Ă lâĂąme en nous et dans les choses, nous rĂ©alisons quâil y a aussi une conscience dans la plante, dans le mĂ©tal, dans lâatome, dans tout ce qui appartient Ă la Nature physique. Sri Aurobindo nous encourage vivement Ă voir par nous-mĂȘmes. Il faut donc dĂ©mĂȘler cette chose en nous qui relie nos diverses maniĂšres dâĂȘtre et nous permet dâentrer en contact avec les autres formes de conscience. Les centres de conscience p65-p70 nous poursuivons notre mĂ©thode expĂ©rimentale nous observons que nous mentalisons tout. Le mental nous permet de porter Ă notre surface consciente tous les mouvements de notre ĂȘtre mais du mĂȘme coup, il nous voile leur voix et leur fonctionnement vĂ©ritables. Le chercheur qui a fait taire son mental commencera Ă distinguer tous ces Ă©tats dans leur rĂ©alitĂ© nue. Il sentira Ă divers points de concentration comme des noeuds de force dotĂ©s chacun dâune qualitĂ© vibratoire particuliĂšre. Ces vibrations semblent sâirradier Ă diffĂ©rentes hauteurs de notre ĂȘtre. LâexpĂ©rience dâune grande vibration rĂ©vĂ©latrice par exemple qui nous fait ressentir le monde comme plus lĂ©ger, plus clair. Nous avons aussi lâexpĂ©rience de vibrations plus Ă©paisses, des vibrations de colĂšre, de peurs, de dĂ©sirs, de sympathie. Il y a en nous toute une gamme de nodules vibratoires ou centres de conscience, chacun spĂ©cialisĂ© dans un type de vibration. Le mental est seulement un des centres, un type de vibration, seulement une des formes de conscience qui veut sâarroger la premiĂšre place. Disons que ces centres appelĂ©s chakras en Inde ne se situent pas dans notre corps physique mais dans une autre dimension bien que leur concentration, Ă certains moments, puisse devenir si intense quâon ait la sensation aigĂŒe dâune localisation physique. Certains correspondent dâassez prĂšs aux diffĂ©rents plexus nerveux que nous connaissons mais pas tous. Grosso modo on peut distinguer sept centres rĂ©partis en quatre zones 1 Le Supraconscient avec un centre un peu au sommet de la tĂȘte qui dirige notre mental pensant et nous met en communication avec des rĂ©gions mentales plus Ă©levĂ©es illuminĂ©es, intuitives, surmentales, etc⊠2 Le Mental avec deux centres lâun, entre les sourcils, qui gouverne la volontĂ© et le dynamisme de toutes nos activitĂ©s mentales quand on veut agir par la pensĂ©e. Câest aussi le centre de la vision subtile ou âtroisiĂšme oeilâ, lâautre, Ă hauteur de la gorge qui gouverne toutes les formes dâexpression mentale. 3 Le Vital avec trois centres lâun Ă hauteur du coeur qui gouverne notre Ă©tat Ă©motif, amour, haine etc⊠le deuxiĂšme Ă hauteur du nombril qui gouverne nos mouvements de domination, de possession, de conquĂȘte, nos ambitions etc⊠et un troisiĂšme, le vital infĂ©rieur entre le nombril et le sexe Ă hauteur du plexus mĂ©sentĂ©rique qui commande les vibrations les plus basses jalousie, envie, dĂ©sir, convoitise, colĂšre. 4 Le physique et le Subconscient avec un centre Ă la base de la colonne qui rĂ©git notre ĂȘtre physique et le sexe. Ce centre nous ouvre plus bas aux rĂ©gions subconscientes. GĂ©nĂ©ralement dans lâhomme ânormalâ ces centres sont endormis ou fermĂ©s ou ne laissent filtrer que le tout petit courant nĂ©cessaire Ă sa mince existence. Avec le yoga ces centres sâouvrent. Ils peuvent sâouvrir de deux maniĂšres de bas en haut ou de haut en bas suivant que lâon pratique un yoga traditionnel ou celui dâAurobindo. A force de concentrations, dâexercices, on peut un jour sentir une Force ascendante qui sâĂ©veille Ă la base de la colonne vertĂ©brale et monte au sommet du crĂąne. Avec le yoga de Sri Aurobindo, la Force descendante ouvre trĂšs lentement, doucement, ces mĂȘmes centres de haut en bas. En agissant de bas en haut nous ouvrons en premier les chakras des vibrations les plus Ă©paisses et sommes branchĂ©s sur la confusion et la boue du monde. Câest pourquoi les yogas traditionnels exigent la prĂ©sence dâun MaĂźtre protecteur. Notre premiĂšre dĂ©couverte est de voir que les vibrations mentales viennent du dehors avant dâentrer dans nos centres vibrations de joie, de volontĂ© etc⊠et que notre ĂȘtre est comme un poste rĂ©cepteur, du haut en bas. La personnalitĂ© frontale p70-p72 13. Nous serons tentĂ©s de protester car enfin ce sont nos sentiments, nos peines, nos dĂ©sirs, notre sensibilitĂ©. Il est vrai quâen un sens câest nous car nous avons pris lâhabitude de rĂ©pondre Ă certaines vibrations plutĂŽt quâĂ dâautres. Mais en y regardant de plus prĂšs, on ne peut mĂȘme pas dire que câest ânousâ qui avons pris toutes ces habitudes ; câest notre milieu, notre Ă©ducation, nos traditions qui ont choisi pour nous. La Nature universelle dit Sri Aurobindo dĂ©pose en nous certaines habitudes de mouvement, de personnalitĂ©, de caractĂšre, certaines facultĂ©s, certaines dispositions, tendances⊠et câest cela que nous appelons nous-mĂȘme. En fait, nous accrochons toujours les mĂȘmes longueurs dâonde. Tout est en Ă©tat de flux constant et tout nous vient dâun mental plus vaste que le nĂŽtre, universel ou de rĂ©gions plus basses subconscientes ; ou plus hautes, supraconscientes. Ainsi, cette petite personnalitĂ© frontale est entourĂ©e, soutenue, traversĂ©e et mue par toute une hiĂ©rarchie de âmondesâ ou comme dit Sri Aurobindo de plans de consciences qui sâĂ©chelonnent sans interruption de lâEsprit pur Ă la MatiĂšre et qui sont en relation avec chacun de nos centres. Mais nous ne sommes conscients que de quelques bulles Ă la surface. Lâindividualisation de la conscience p72-p75 commençons Ă entrevoir ce quâest la conscience et Ă sentir quâelle est partout dans lâunivers mais nous nâavons pas encore trouvĂ© ânotreâ conscience. Nous avons tous senti, Ă certains moments privilĂ©giĂ©s de notre existence comme une chaleur dans notre ĂȘtre, une sorte de poussĂ©e intĂ©rieure ou de force vivante qui surgit de rien, sans cause, comme une flamme. Mais bien vite, nous sortons de cette adolescence et le mental sâempare de cette force, comme il sâempare de tout et la recouvre de grands mots idĂ©alisants. Il la fait entrer dans une oeuvre, un mĂ©tier, une Eglise ou le vital sâen saisit et la badigeonne de sentiments plus ou moins nobles ou la fait entrer dans quelque aventure ou quâil sâen serve pour dominer, vaincre, possĂ©der. Mais le chercheur qui a fait taire son mental et ne risque plus dâĂȘtre pris au piĂšge des idĂ©es, qui a tranquillisĂ© son vital et nâest plus emportĂ© dans la grande dispersion des sentiments et des dĂ©sirs redĂ©couvre dans cet Ă©claircissement de son ĂȘtre, comme un nouvel Ă©lan de jeunesse une nouvelle poussĂ©e Ă lâĂ©tat libre. A mesure que sa concentration grandira par ses âmĂ©ditations activesâ, par son aspiration, son besoin, il sentira que cette poussĂ©e se met Ă vivre âElle sâĂ©largit et fait sortir ce qui vit, dit le Rig-VĂ©da, Ă©veillant quelquâun qui Ă©tait mortâ. Elle prend de plus en plus de puissance et dâindĂ©pendance comme si câĂ©tait Ă la fois une force et un ĂȘtre dans son ĂȘtre. Il remarquera dans ses mĂ©ditations passives tout dâabord que cette force en lui a des mouvements, une masse, des intensitĂ©s variables et quâelle monte et descend au-dedans de lui. Dans les mĂ©ditations actives, la vie ordinaire, cette force sera plus diluĂ©e et donnera lâimpression dâune petite vibration sourde Ă lâarriĂšre plan. Avec cette petite chose dedans qui vibre, on est invulnĂ©rable et plus jamais seul. Câest chaud, câest proche, câest fort. Alors nous avons touchĂ© la rĂ©alitĂ© fondamentale de notre ĂȘtre, le centre vrai, chaleur et ĂȘtre, conscience et force. Le chercheur sâapercevra que cette poussĂ©e ne se meut pas au hasard, comme il lui avait semblĂ© tout dâabord, mais quâelle se rassemble en divers points de son ĂȘtre suivant les activitĂ©s du moment. Tous les centres, y compris le mental, ne sont que ses ouvertures sur les diffĂ©rents Ă©tages de la rĂ©alitĂ© universelle ou ses instruments de transcription et dâexpression. Câest elle le voyageur des mondes,Savitri 2893, lâexplorateur des plans de conscience, elle qui relie nos diverse maniĂšres dâĂȘtre. En dâautres termes nous aurons dĂ©couvert la conscience. Nous pouvons dĂ©placer notre conscience vers des rĂ©gions plus profondes ou plus hautes, inaccessibles au mental et Ă nos organes des sens car la conscience nâest pas une façon de penser ou de sentir mais un pouvoir dâentrer en contact avec la multitude des degrĂ©s de lâexistence, visibles ou invisibles. Nous verrons que cette conscience est indĂ©pendante de ce que lâon pense, de ce que lâon sent, quâelle est indĂ©pendante du mental et du vital et mĂȘme du corps car dans certains Ă©tats particuliers dont nous reparlerons elle sort du corps et va se promener ailleurs pour faire des expĂ©riences. Conscience-force, Conscience-joie p75-p80 dĂ©couvrant la conscience nous avons dĂ©couvert que câĂ©tait une force. Conscience-force dit Sri Aurobindo car en vĂ©ritĂ© les deux termes sont insĂ©parables et convertibles lâun en lâautre. La sagesse ancienne de lâInde connaissait bien ce fait et ne parlait jamais de conscience, Chit, sans y adjoindre le terme Agni, chaleur, flamme, Ă©nergie, Chit-Agni ou parfois elle emploie le mot Tapas qui est synonyme dAgni. Nous parlons de plusieurs forces descendante, ascendante, mentale, vitale, matĂ©rielle mais il nây a quâune seule Force au monde, un seul courant unique et qui selon le niveau oĂč il opĂšre se revĂȘt dâune substance ou dâune autre. Câest elle qui relie tout, anime tout, elle la substance fondamentale de lâunivers Conscience-Force, Chit-Agni. Sâil est vrai que la conscience est une force, inversement la force est une conscience et toutes les forces sont conscientes. Câest partout le mĂȘme courant de conscience avec des modalitĂ©s vibratoires diffĂ©rentes que ce soit dans la plante, dans les rĂ©flexions du mental humain, dans le supraconscient lumineux et dans lâinstinct de la bĂȘte, dans le mĂ©tal et dans nos mĂ©ditations profondes. Einstein nous a appris que MatiĂšre et Energie sont convertibles lâune lâautre E= mcÂČ. Il nous reste Ă dĂ©couvrir pratiquement que cette Energie est une Conscience et que la matiĂšre, elle aussi, est une forme de conscience. Quand nous aurons trouvĂ© ce Secret nous aurons la vraie maĂźtrise des Ă©nergies matĂ©rielles. Mais nous ne faisons que redĂ©couvrir de trĂšs anciennes vĂ©ritĂ©s. Il y a quatre mille ans les Upanishads savaient que la MatiĂšre est de lâEnergie condensĂ©e â Par lâĂ©nergie de sa conscience Brahman sâest massĂ© ; de cela la MatiĂšre est nĂ©e, et de la MatiĂšre, la Vie, le Mental et les mondes Mundaka Upanishad , Tout est Conscience ici bas, parce que tout est lâEtre ou lâEsprit. Tout est Chit-conscience- parce que tout est Sat -existence-, Sat Chit. Ă divers niveaux de sa propre manifestation. Lâhistoire de notre Ă©volution terrestre, finalement, est lâhistoire dâune lente conversion de la Force en Conscience ou plus exactement un lent rappel de cette Conscience engloutie dans sa Force. Tout le progrĂšs Ă©volutif, en fin de compte, se mesure Ă la capacitĂ© de dĂ©gagement ou de dĂ©crochage de lâĂ©lĂ©ment conscience hors de son Ă©lĂ©ment force. Câest ce que nous appelons lâindividualisation de la conscience. Au stade spirituel ou yogique de notre Ă©volution la conscience est totalement dĂ©gagĂ©e de ses tourbillonnements mentaux, vitaux, physiques. Elle est capable de parcourir toute la gamme des vibrations de lâatome Ă lâEsprit. Si nous commençons Ă percevoir la conscience intĂ©rieure dit Sri Aurobindo on peut en faire toutes sortes de choses lâenvoyer Ă lâextĂ©rieur sous forme de courant de force, tracer un cercle de conscience autour de soi, diriger une idĂ©e pour quâelle entre dans la tĂȘte de quelquâun en AmĂ©rique. Si nous nâavions pas fait des milliers dâexpĂ©riences ⊠nous nâen parlerions pas comme nous en parlons. A un stade ultĂ©rieur, nous verrons que la Conscience peut agir sur la MatiĂšre et la transformer. Cette ultime conversion de la MatiĂšre en Conscience et peut -ĂȘtre un jour de la Conscience en MatiĂšre est lâobjet du yoga supramental dont nous reparlerons plus tard. Mais il y a bien des degrĂ©s de dĂ©veloppement de la conscience-force depuis le chercheur qui sâĂ©veille jusquâau yogi. Câest ici que la vraie hiĂ©rarchie commence. Il est une ultime Ă©quivalence. Non seulement la conscience est force, non seulement la conscience est ĂȘtre mais la conscience est joie, Ănanda Chit-Ănanda. Etre conscient câest la joie, une joie solide, vaste, paisible. Elle est irrĂ©futablement comme un roc Ă travers tous les temps, tous les lieux, comme un sourire derriĂšre et partout. Tout lâĂ©nigme de lâunivers est lĂ . Il nây en pas dâautre. Un sourire imperceptible, un rien qui est tout. Sat-Chit-Ănanda â Existence, Conscience, Joie â triade Ă©ternelle qui est lâunivers et que nous sommes âDe la joie tous ces ĂȘtres sont nĂ©s ; par la joie ils existent et grandissent ; Ă la joie ils retournentâ. TaĂŻttiriya Upanishad 6 La pacification du vital _________________________ p81-p100 Limites de la morale p81-p83 est une zone de notre ĂȘtre, Ă la fois source dâune grosse difficultĂ© et dâun grand pouvoir, une source de difficultĂ©s, parce quâelle brouille toutes les communications du dehors ou dâen haut en sâopposant frĂ©nĂ©tiquement Ă nos efforts de silence mental et une source de pouvoir parce que câest lâaffleurement de la grande force de vie en nous. Nous avons nommĂ© la rĂ©gion qui sâĂ©tend entre le coeur et le sexe et que Sri Aurobindo appelle le vital. Câest le lieu de tous les mĂ©langes le plaisir y est inextricablement liĂ© Ă la souffrance, la peine Ă la joie et la comĂ©die Ă la vĂ©ritĂ©. Les diverses spiritualitĂ©s du monde y ont trouvĂ© tant dâennuis quâelles ont tracĂ© une croix sur ce domaine dangereux. Mais cette chirurgie morale dit Aurobindo prĂ©sente un double inconvĂ©nient elle ne purifie pas vraiment car les Ă©motions du haut sont aussi sentimentales et donc partiales. Dâautre part, elle ne rejette pas vraiment mais refoule. En outre la morale ne fonctionne que dans les limites du fonctionnement mental. Elle nâa pas accĂšs aux rĂ©gions du subconcient ou supraconscient, ni dans la mort, ni dans le sommeil. Au reste, le chercheur ne pense pas en terme de bien et de mal mais en terme dâexactitude et dâinexactitude. Le chercheur fera donc une distinction entre les choses qui brouillent sa vision et celles qui la rendent claire ; ce sera lâessentiel de sa âmoraleâ. Lâhabitude de rĂ©pondre p83-p88 premiĂšre chose quâil distinguera dans son exploration vitale, câest une fraction du mental qui semble avoir pour seule fonction de donner une forme et une justification Ă nos impulsions, nos sentiments, nos dĂ©sirs; câest ce que Sri Aurobindo appelle le mental vital. DĂ©jĂ nous avons vu la nĂ©cessitĂ© du silence mental et nous Ă©tendrons notre discipline Ă cette couche infĂ©rieure du mental. Nous prendrons alors connaissance, spontanĂ©ment, dâune quantitĂ© de vibrations que les gens Ă©manent constamment, sans mĂȘme le savoir, et nous saurons de quoi il retourne ou devant qui nous nous trouvons. le polissage extĂ©rieur nâayant rien Ă voir, le plus souvent, avec cette petite rĂ©alitĂ© qui vibre. Nous saurons le pourquoi de nos sympathies ou antipathies, de nos craintes, de nos malaises. Nous nous apercevrons dâun phĂ©nomĂšne trĂšs intĂ©ressant notre silence intĂ©rieur a un pouvoir. Par exemple, la colĂšre, au lieu de nous mettre Ă vibrer intĂ©rieurement Ă lâunisson de celui qui parle, si nous savons rester immobile, nous verrons la colĂšre de lâautre se dissoudre peu Ă peu comme une fumĂ©e. Seulement, il ne sâagit pas dâavoir un masque impassible et de bouillonner en dedans on ne triche pas avec les vibrations. Il sâagit de la vraie maĂźtrise intĂ©rieure. Ce silence peut annuler nâimporte quelle vibration car elles sont contagieuses par exemple, le MaĂźtre peut ainsi transmettre des expĂ©riences spirituelles ou un pouvoir Ă un disciple. La clef de la maĂźtrise est toujours le silence, Ă tous les niveaux, parce que dans le silence nous percevons les vibrations et les distinguons câest le pouvoir de saisir. La vie extĂ©rieure ordinaire devient un immense champ dâexpĂ©riences. Câest pourquoi Sri Aurobindo a toujours voulu y mĂȘler son yoga. Il est trĂšs facile, seul, de vivre dans la parfaite illusion de la maĂźtrise de soi. Mais ce pouvoir dâimmobilitĂ© intĂ©rieure a des applications beaucoup plus importantes ; nous voulons parler de notre propre vie psychologique. La grosse difficultĂ© du vital est quâil sâidentifie faussement Ă tout ce qui semble sortir de lui. Il dit âma peineâ, ma âdĂ©pressionâ, mon âdĂ©sirâ et se prend pour toutes sortes de petits âjeâ qui ne sont pas lui. Par exemple, nous sommes seul ou en compagnie de telle ou telle personne et nous sentons quelque chose qui nous tire ou qui cherche Ă entrer en nous. Si nous attrapons la vibration nous nous retrouvons cinq minutes plus tard en train de lutter contre une dĂ©pression, dâavoir tel dĂ©sir, telle fĂ©brilitĂ©. Le chercheur qui a cultivĂ© le silence ne se laisse pas prendre Ă cette fausse identification. Il a fini par dĂ©couvrir ce que Sri Aurobindo appelle le circumconscient. Câest une sorte dâatmosphĂšre individuelle ou dâenveloppe protectrice. Câest lĂ que nous pourrons sentir et attraper les vibrations psychologiques avant quâelles nâentrent. Notre culture du silence a créé une transparence suffisante pour que nous puissions les voir venir, puis les arrĂȘter au passage et les rejeter. Elles resteront Ă tourner en rond dans le circumconscient et nous pourrons sentir trĂšs distinctement la colĂšre, le dĂ©sir, la dĂ©pression rĂŽder autour de nous. Nous serons surpris de voir quâun jour certaines vibrations ne nous touchent plus. Ou encore, nous nous apercevrons que certains Ă©tats psychologiques dĂ©ferlent Ă heure fixe ou se rĂ©pĂštent suivant certains mouvements cycliques que Sri Aurobindo ou la MĂšre appellent des formations, câest Ă dire un amalgame de vibrations qui a fini par acquĂ©rir une sorte de personnalitĂ© indĂ©pendante. Il y a mille expĂ©riences possibles, câest un monde dâobservations. La dĂ©couverte essentielle que nous aurons faite est quâil y a peu de nous dans tout cela sauf une habitude Ă rĂ©pondre. Tant que nous nous identifions faussement aux vibrations vitales, par ignorance, il est impossible de changer quoi que ce soit Ă notre nature. Contrairement Ă tous les dictons, la nature humaine peut-ĂȘtre changĂ©e car il nâest rien dans notre nature ou notre conscience qui ne soit inĂ©luctablement fixĂ©. Tout nâest quâun jeu de forces et vibrations. Câest pourquoi le yoga de Sri Aurobindo envisage la possibilitĂ© dâun renversement total des rĂšgles qui gouvernent ordinairement les rĂ©actions de la conscience. La vraie mĂ©thode de la maĂźtrise vitale nâest pas chirurgicale mais pacificatrice on ne lutte pas vitalement contre elle mais on la neutralise par une paix silencieuse si vous Ă©tablissez la paix, Ă©crit Sri Aurobindo, il devient aisĂ© de nettoyer le vital. La paix est quelque chose de propre en soi, et si vous lâĂ©tablissez, câest une façon positive dâarriver au but. Chercher la boue seulement et nettoyer est un chemin nĂ©gatif. Les forces adverses p88-p92 18. Il est une autre difficultĂ©, car les vibrations qui viennent des gens ou du vital universel ne sont pas seules Ă dĂ©ranger le chercheur. Il est un type de vibration dâune qualitĂ© particuliĂšre qui se distingue par sa soudainetĂ© et sa violence. En quelques instants il sera âun autre hommeâ ayant tout oubliĂ©, ses efforts, son but comme si tout Ă©tait dĂ©pourvu de sens, dĂ©composĂ©. Câest ce que Sri Aurobindo et la MĂšre appellent les forces adverses. Ce sont des forces trĂšs conscientes, dont le seul but apparemment, est de dĂ©courager le chercheur ou de le dĂ©tourner du chemin quâil sâest choisi. Le premier symptĂŽme de leur prĂ©sence est que la joie se voile, la conscience se voile et tout est enveloppĂ© dans une atmosphĂšre de drame. DĂšs quâil y a souffrance on peut ĂȘtre sĂ»r que lâennemi est lĂ . Leur premier soin, gĂ©nĂ©ralement, est de nous pousser Ă des dĂ©cisions subites, extrĂȘmes irrĂ©vocables. Câest une vibration aiguĂ« qui veut sâexĂ©cuter immĂ©diatement. On dĂ©couvre que lâon est capable de descendre aussi bas que lâon est montĂ© haut. Bien des Ă©cailles nous tombent des yeux et, comme dit Sri Aurobindo, notre vertu est dâune prĂ©tentieuse impuretĂ©. Toutes sortes de noms dĂ©moniaques et ânoirsâ ont donc Ă©tĂ© rĂ©servĂ©s Ă ces forces adverses dans lâhistoire spirituelle du monde. LâexpĂ©rience nous montre que ces forces perturbatrices ont leur place dans lâĂ©conomie universelle et quâelles ne sont perturbatrices quâau niveau de notre petite conscience momentanĂ©e. Pour lâindividu comme pour le monde, ces forces peu gracieuses sont des instruments de progrĂšs. â Ce par quoi tu tombes est cela mĂȘme par quoi tu tâĂ©lĂšvesâ dit le Kularnava Tantra dans sa sagesse. Pour lâĂąme en voie de croissance, pour lâEsprit au-dedans de nous, les difficultĂ©s, les obstacles, les attaques ne seraient-ils pas un moyen de grandir, dâintensifier sa force, dâĂ©largir son expĂ©rience, de sâentraĂźner Ă la victoire spirituelle ? La VĂ©ritĂ© bouge, elle a des jambes et les princes des tĂ©nĂšbres sont lĂ pour veiller Ă ce quâelle ne sâendorme pas. Les nĂ©gations de Dieu nous sont aussi utiles que ses affirmations dit Sri Aurobindo. LâAdversaire ne disparaĂźtra pas dit la MĂšre que lorsquâil ne sera plus nĂ©cessaire dans le monde. Et nous savons trĂšs bien quâil est nĂ©cessaire, comme la pierre de touche pour lâor, pour voir si lâon est vrai. La mĂ©thode vis Ă vis des forces adverses est la mĂȘme que pour les autres vibrations silence, immobilitĂ© intĂ©rieure qui laisse passer la vague. Nous pourrons ĂȘtre secouĂ©s et, portant, tout au fond, nous sentirons ce âtĂ©moinâ en nous, qui nâest pas touchĂ©. Pratiquement, le chercheur du yoga intĂ©gral sera beaucoup plus exposĂ© que les autres. Sri Aurobindo disait souvent que son yoga est une bataille parce quâil veut tout englober dans sa conscience. Il nây a pas rien quâun passage Ă forcer vers la bĂ©atitude du haut mais beaucoup de passages; Ă droite, Ă gauche et en bas et Ă tous les niveaux de notre ĂȘtre et plus dâun trĂ©sor Ă dĂ©couvrir. Le vital vrai p92-p100 y a donc un passage Ă franchir si nous voulons trouver la vraie force de vie derriĂšre la vie troublĂ©e de lâhomme frontal. Suivant les spiritualitĂ©s traditionnelles, ce passage sâaccompagne de toutes sortes de mortifications et de renoncements. Nous avons autre chose en vue. Nous ne cherchons pas Ă quitter la vie mais Ă lâĂ©largir. Le yoga est un plus grand art de vivre » disait Sri Aurobindo. Lâattitude de lâascĂšte qui dit âJe ne veux rienâ et lâattitude de lâhomme du monde qui dit âje veux cette choseâ sont les mĂȘmes, observe la MĂšre. Lâun peut ĂȘtre aussi attachĂ© Ă son renoncement que lâautre Ă sa possession. En fait, tant que lâon a besoin de renoncer Ă quoi que ce soit on nâest pas prĂȘt. On est encore jusquâau cou dans les dualitĂ©s. Si nous avons dĂ©masquĂ© ce simple point, nous aurons saisi tout le fonctionnement du vital du haut en bas la souffrance, la privation autant que lâabondance lâintĂ©ressent autant que la joie, la haine autant que lâamour, la torture autant que lâextase, dans tous les cas il sâengraisse. Nous avons saisi un autre travers du vital de surface câest un incorrigible charlatan. Nous savons tous cela et pourtant nous sommes toujours dâincorrigibles sentimentaux. Il prend la force de ses sentiments pour la force de la vĂ©ritĂ©. Une autre observation qui dĂ©coule de la premiĂšre sâimpose assez vite Ă nous câest la complĂšte impuissance du vital Ă aider autrui ou tout simplement Ă communiquer avec les autres sauf quand il y a conjonction dâĂ©goĂŻsmes. En rĂ©alitĂ© le vital ne cherche pas Ă aider, il cherche Ă prendre, toujours, de toutes les façons. Nos peines et nos souffrances sont toujours le signe dâun mĂ©lange et donc toujours mensongers. Seule la joie est vraie. Nous protesterons au nom de nos sentiments et dirons â Mais le Coeur ?â. Justement, le coeur est-il lieu plus mĂ©langĂ© ? En outre il sâessouffle vite et ce sera notre troisiĂšme observation. Pour une conscience cosmique dans son Ă©tat de connaissance complĂšte et dâexpĂ©rience complĂšte, tous les contacts sont perçus comme une joie, Ănanda. Seule lâĂ©troitesse de conscience, lâinsuffisance de conscience est la cause de tous nos maux, moraux et mĂȘme physiques, et de cette sempiternelle tragi-comĂ©die de lâexistence. Le chercheur ne sera plus dupe du jeu Ă©quivoque qui se dĂ©roule dans son vital de surface mais il gardera longtemps encore lâhabitude de rĂ©pondre aux mille petites vibrations biologico-sentimentales qui font la ronde autour. Câest un passage assez long comme de passer du mental rabĂącheur au silence mental. Mais lĂ aussi, il sera aidĂ© par la Force descendante qui contribuera puissamment Ă Ă©tablir un rythme nouveau en lui. Il remarquera que sâil fait seulement un tout petit pas en avant lâAide dâen haut en fera dix vers lui comme sâil Ă©tait attendu. En rĂ©alitĂ© le chercheur nâobĂ©it pas Ă un impĂ©ratif austĂšre et nĂ©gatif il suit une poussĂ©e positive de son ĂȘtre il grandit rĂ©ellement et les normes dâhier ou les plaisirs dâavant-hier lui semblent aussi minces quâune diĂšte de nourrisson- Il nâest pas Ă lâaise lĂ dedans, il a mieux Ă faire, mieux Ă vivre. DerriĂšre ce vital infantile, inquiet, vite Ă©puisĂ© nous dĂ©couvrons un vital calme et puissant- ce que Sri Aurobindo appelle le vital vrai. Nous entrons dans un Ă©tat de concentration tranquille, spontanĂ©e, comme peut lâĂȘtre la mer sous le jeu des vagues. Cette immobilitĂ© est une puissance concentrĂ©e qui peut mettre en mouvement tous les actes, supporter tous les chocs sans perdre son repos. Câest une intarissable source dâĂ©nergie. Les capacitĂ©s de travail et mĂȘme dâeffort physique sont dĂ©cuplĂ©es. La nourriture et le sommeil cessent dâĂȘtre les sources uniques de renouvellement des Ă©nergies. Dâautres pouvoirs qui passent pour âmiraculeuxâ peuvent se manifester. Il nây a pas lieu dâen parler ici, mieux vaut faire soi-mĂȘme lâexpĂ©rience. Dans cette immobilitĂ© un autre signe sâĂ©tablira dâune façon permanente lâabsence de souffrance et une sorte de joie inaltĂ©rable. Le chercheur qui aura Ă©tabli quelque immobilitĂ© verra que celle-ci dissout les chocs parce quâil est large, quâil nâest plus un petit individu serrĂ© sur lui-mĂȘme. Avec lâexpĂ©rience du yoga, la conscience sâĂ©largit dans toutes les directions-autour, au-dessous, au-dessus- et dans chaque direction, Ă lâinfini. Sa base est un vide infini ou un silence infini mais dans ce vide ou ce silence tout peut se manifester la Paix, la LibertĂ©, le Pouvoir, la LumiĂšre, la Connaissance, la Joie. DĂšs quâil y a souffrance de quelque ordre que ce soit, câest le signe immĂ©diat dâun rĂ©trĂ©cissement de lâĂȘtre et dâune perte de conscience. Quand le chercheur sâĂ©lĂšvera dans le Supraconscient il comprendra que les intensitĂ©s de lâEsprit peuvent aussi ĂȘtre foudroyantes. en rĂ©alitĂ© câest toujours la mĂȘme Force, divine, la mĂȘme Conscience-Force , en haut, en bas , dans la MatiĂšre ou dans la Vie ou dans le Mental ou plus haut, mais plus Elle descend plus Elle est obscurcie, dĂ©formĂ©e , fragmentĂ©e. 7 Le centre psychique ______________________ p101-p120 20. Le mental nâest pas nous, puisque toutes nos pensĂ©es viennent dâun Mental plus vaste que le nĂŽtre, universel. Le vital nâest pas nous, ni nos sentiments ni nos actes, puisque toutes les impulsions viennent dâun Vital plus large que le nĂŽtre, universel. Ce corps non plus, nâest pas nous, car ses composants viennent dâune MatiĂšre et obĂ©issent Ă des lois plus grandes que les NĂŽtres, universelles. Quelle est donc cette chose en nous qui fait que nous sommes âjeâ , mĂȘme si tout le reste sâĂ©croulait ? Et surtout qui est âjeâ quand tout le reste sâĂ©croule, parce que câest lâheure de notre vĂ©ritĂ©. Au cours de notre reconnaissance, nous avons observĂ© divers centres ou niveaux de conscience et nous avons vu que, derriĂšre ces centres, il y avait une conscience-force qui se mouvait et qui reliait nos divers Ă©tats dâĂȘtre et nous avons senti que ce courant de force, ou de conscience, Ă©tait la rĂ©alitĂ© fondamentale de notre ĂȘtre derriĂšre tous nos Ă©tats. Qui donc est conscient en nous ? La vĂ©ritĂ© est double. En aucun cas nous ne sommes des marionnettes. Nous avons ce que Sri Aurobindo appelle lâĂȘtre psychique et un centre cosmique ou ĂȘtre central. Etape par Ă©tape nous devons retrouver lâun et lâautre et devenir le MaĂźtre de tous nos Ă©tats. Pour lâinstant nous irons seulement Ă la dĂ©couverte de notre centre individuel, le psychique, que dâautres appellent Ăąme. Câest Ă la fois la chose la plus simple du monde et la plus difficile. La plus simple parce quâun enfant comprend cela, il vit cela spontanĂ©ment. Il vit dans son ĂȘtre psychique. La plus difficile, parce que cette spontanĂ©itĂ© est bientĂŽt recouverte par toutes sortes dâidĂ©es, de sentiments. Alors on commence Ă parler âdâĂąmeâ, câest Ă dire quâon y comprend plus rien. Toutes les souffrances de lâadolescence sont justement lâhistoire dâun lent emprisonnement psychique. Toutes les difficultĂ©s du chercheur sont lâhistoire inverse dâune lente extirpation de tous les mĂ©langes mentaux et vitaux. Mais ce nâest pas seulement un voyage Ă lâenvers car on ne revient jamais en arriĂšre et au bout du voyage on ne retrouve pas lâenfant psychique mais une royautĂ© consciente. Car le psychique est un ĂȘtre, il grandit, il est le miracle dâune enfance Ă©ternelle dans un royaume de plus en plus vaste. Il est âdedans comme un enfant qui doit naĂźtreâ. dit le Rig-Veda La naissance psychique p103-p109 21. Les premiĂšres manifestations du psychique sont la joie et lâamour. Une joie tranquille, profonde, comme la mer. La joie profonde nâa besoin de rien pour ĂȘtre, elle est. Un amour qui nâa besoins de rien pour ĂȘtre, il est. Il est invulnĂ©rable, rien ne le touche. Rien nâest bas pour lui, ni haut, ni pur, ni impur. Il est lĂ©ger, rien ne lui pĂšse. Il est invulnĂ©rable, rien ne le touche. Il est tranquille, tranquille comme un petit souffle au fond de lâĂȘtre. Il est Dieu en nous. Pour lâoeil qui voit, voilĂ comment le psychisme apparaĂźt Quand on regarde quelquâun qui est conscient de son Ăąme et qui vit dans son Ăąme, dit la MĂšre, on a lâimpression de descendre, dâentrer profondĂ©ment, profondĂ©ment dans la personne, loin, trĂšs loin, dedans tandis que, gĂ©nĂ©ralement, quand on regarde les yeux des gens, il y a des yeux oĂč lâon nâentre pas, câest fermĂ© comme une porte. Il y a des yeux qui sont ouverts, on entre, puis on rencontre derriĂšre, assez prĂšs, quelque chose qui vibre, qui brille, qui scintille. Câest son vital. Pour trouver lâĂąme, il faut se reculer de la surface, se retirer profondĂ©ment, descendre dans un trou trĂšs profond, silencieux, immobile, ça câest lâĂąme. Mais ce sont lĂ des signes seulement. Comment ouvrir les portes du psychisme ? Car il est bien cachĂ©. Tout dâabord il est cachĂ© par nos idĂ©es, nos sentiments qui le pillent et le singent sans merci. Il est aussi happĂ© par le vital qui en fait ses brillantes exaltations, ses Ă©motions âdivinesâ et palpitantes, ses amours accaparantes. Il est mis en cage par le mental qui en fait ses idĂ©aux exclusifs, ses philanthropies infaillibles, ses morales cadenassĂ©es; et des Eglises, dâinnombrables Eglises qui le mettent en articles et en dogmes. OĂč est le psychisme la dedans ? Le gros Ă©cueil, câest quand il sort de sa cachette une seconde. Il jette une telle gloire sur tout ce quâil touche que nous confondons sa lumineuse vĂ©ritĂ© avec la circonstance de la rĂ©vĂ©lation. Tel qui eut la rĂ©vĂ©lation de son psychisme, un jour en Ă©coutant Beethoven, dira la musique, rien que la musique est divine ici bas. Tel autre, qui aura senti son Ăąme dans lâimmensitĂ© de la mer se fera une religion du grand large et tel autre dira mon prophĂšte, ma chapelle, mon Ă©vangile. Chacun bĂątit ainsi sa construction autour du noyau dâexpĂ©rience. Mais le psychisme est libre merveilleusement libre de tout. Le monde va ainsi, accablĂ© de demi-vĂ©ritĂ©s qui sont plus lourdes que des mensonges. Si lâon veut avoir lâexpĂ©rience du psychique dans sa puretĂ© cristalline, il faut faire une transparence en soi car, dĂšs que lâon est clair, la VĂ©ritĂ© Ă©merge spontanĂ©ment, la vision, la joie, tout. La VĂ©ritĂ© est la chose la plus naturelle qui soit au monde. Câest le reste qui brouille tout, le mental et le vital. Toutes les disciplines spirituelles dignes de ce nom ne doivent tendre, finalement, quâĂ ce point naturel oĂč nous nâavons plus besoin dâefforts. Le chercheur nâessaiera pas dâentrer dans le brouillage du mental moral, ni de faire lâimpossible tri du bien et du mal pour dĂ©gager le psychisme. Câest ce que Sri Aurobindo appelle un changement de conscience. Dans cette transparence, les vieux plis de lâĂȘtre se dĂ©feront tranquillement et nous sentirons une autre position de la conscience, pas une position intellectuelle, un centre de gravitĂ©. A hauteur du coeur, mais plus profond que le centre vital du coeur nous sentirons une zone de concentration plus intense que les autres, qui est comme leur point de convergence- câest le centre psychique. Quelque chose sâallume au centre, comme un feu â Agni. Câest le vraiâ jeâ en nous. On dit âprĂ©sence â mais câest plutĂŽt comme une absence poignante, comme un trou vivant que lâon porte dedans et qui chauffe, qui brĂ»le, qui pousse de plus en plus et qui finit par devenir rĂ©el et seulement rĂ©el dans un monde oĂč lâon se demande si les hommes vivent ou font semblant. Il faut le dĂ©gager avec patience de son propre corps dit lâUpanishad. Câest lui âlâenfant enfermĂ© dans la caverne secrĂšteâ dont parle le Rig Veda .1, âle fils du ciel par le corps de la terreâ â lui qui est Ă©veillĂ© dans ceux qui dorment â .â Il est comme la vie et comme le souffle de notre existence, il est comme notre enfant Ă©ternelâ Il est comme âle Roi brillant qui nous Ă©tait cachĂ© Câest le Centre, le MaĂźtre, le lieu oĂč tout communique Un espace ensoleillĂ© oĂč tout est jamais connu. Si nous avons senti ce Soleil dedans, cette flamme, cette vie vivante â il y a tant de vies mortes â fĂ»t-ce une seconde dans une existence, tout est changĂ© ; câest un souvenir devant lequel tous les autres sont pĂąles. Câest le Souvenir. Si nous sommes fidĂšles Ă cet Agni qui brĂ»le, il grandira de plus en plus, comme un ĂȘtre vivant dans notre chaire. Une sensation terrible de quelque chose qui empĂȘche de voir et de passer; on essaie de passer au travers et puis on est en prĂ©sence dâun mur dit la MĂšre. Puis, Ă force de besoin, Ă force de vouloir, la tension psychique, un jour, atteindra son point de renversement et nous aurons lâexpĂ©rience. Quelque chose bascule dans la conscience. Au lieu dâĂȘtre dehors et de chercher Ă voir dedans, on est dedans et, de la minute oĂč on est dedans, absolument tout change, complĂštement. Tout ce qui vous paraissait vrai, naturel, normal, rĂ©el, tangible, tout cela immĂ©diatement vous paraĂźt trĂšs grotesque, trĂšs drĂŽle, trĂšs irrĂ©el, trĂšs absurde. Mais on a touchĂ© quelque chose qui est suprĂȘmement vrai et Ă©ternellement beau ; et cela on ne le perd plus. âĂ Feu, ĂŽ Agni, quand tu es bien portĂ© par nous, tu deviens la suprĂȘme croissance, la suprĂȘme expansion de notre ĂȘtre ; toute gloire et toute beautĂ© sont dans ta couleur dĂ©sirable, dans ta vision parfaite. Ă Ă©tendue, tu es la plĂ©nitude qui nous porte au bout du chemin, tu es une multitude de richesses rĂ©pandues de tous cĂŽtĂ©sâ Rig-VĂ©da La MĂšre expliquait ainsi lâexpĂ©rience ⊠Alors toute la concentration, toute lâaspiration se rassemble en un faisceau et va poussant, poussant contre cette porte, poussant de plus en plus, avec une Ă©nergie croissante, jusquâĂ ce que tout dâun coup, la porte cĂšde. Et on entre, comme prĂ©cipitĂ© dans la lumiĂšre. Alors on est vraiment nĂ©. La croissance psychique p109-p120 toutes les expĂ©riences, lorsque sâouvre la porte du psychique, la plus immĂ©diate et la plus irrĂ©sistible est dâavoir toujours Ă©tĂ© et dâĂȘtre pour toujours. On Ă©merge dans une autre dimension, oĂč lâon voit quâon est vieux comme le monde et Ă©ternellement jeune et que cette vie est une expĂ©rience, un chaĂźnon, dans une succession ininterrompue dâexpĂ©riences qui sâĂ©tendent derriĂšre nous et se perdent dans le futur. â Vieux et usĂ© il devient jeune encore et encore â dit le Rig-Veda Ce que lâon appelle communĂ©ment la rĂ©incarnation nâest pas propre Ă lâenseignement de Sri Aurobindo ; toutes les sagesses anciennes en ont parlĂ©, de lâExtrĂȘme-Orient Ă lâEgypte et aux nĂ©oplatoniciens mais Sri Aurobindo lui donne un sens nouveau. DĂšs lâinstant oĂč lâon sort de la petite vision momentanĂ©e dâune vie unique coupĂ©e par la mort, deux attitudes sont possibles ; ou bien on peut penser, avec les spiritualistes exclusifs, que toutes ces vies sont douloureuses et futiles dont il importe de se libĂ©rer au plus tĂŽt pour se reposer en Dieu, en Brahman ou en quelque Nirvana ; ou bien on peut croire avec Sri Aurobindo â une croyance qui repose sur une expĂ©rience â que lâensemble de ces vies reprĂ©sente une croissance de conscience qui culmine dans un accomplissement terrestre ; autrement dit quâil y a une Ă©volution de la conscience derriĂšre lâĂ©volution des espĂšces et que cette Ă©volution spirituelle doit aboutir Ă une rĂ©alisation individuelle et collective sur la terre. Câest hors du monde que les spiritualistes ont cherchĂ© la libĂ©ration et le salut. EnvisagĂ©e du point de vue dâune Ă©volution de la conscience, la rĂ©incarnation cesse dâĂȘtre la ronde futile que dâaucuns y ont vu ou lâextravagance imaginative que dâautres en ont fait. Avec une clartĂ© toute occidentale Sri Aurobindo nous dĂ©barrasse du âroman feuilleton spirituelâ, comme dit la MĂšre oĂč tant de connaissances sĂ©rieuses ont dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© depuis la fin de lâĂąge des mystĂšres et il nous invite Ă une expĂ©rimentation lucide tout simplement. Il ne sâagit pas de croire en la rĂ©incarnation mais dâen avoir lâexpĂ©rience et dâabord de savoir dans quelles conditions lâexpĂ©rience est possible. Pendant des vies et des vies le psychique grandit silencieusement derriĂšre la personnalitĂ© frontale. Quand celle-ci se dissout, il emmĂšne seulement lâessence de toutes ses expĂ©riences. Chaque vie reprĂ©sente donc un type dâexpĂ©rience nous croyons faire beaucoup dâexpĂ©riences mais câest toujours la mĂȘme. Plus il grandira, plus la conscience-force sâindividualisera en nous jusquâau jour oĂč il jaillira au grand jour. Alors, il pourra prendre conscience directement du monde autour. Il sera le maĂźtre de la nature au lieu dâĂȘtre son prisonnier endormi. Le yoga est le point de dĂ©veloppement oĂč nous passons des mĂ©andres de lâĂ©volution naturelle Ă une Ă©volution consciente et dirigĂ©e câest un processus dâĂ©volution concentrĂ©e. Sans rĂ©incarnation on sâexplique mal, lâimmense diffĂ©rence de degrĂ©s entre les Ăąmes, celle dâun souteneur, par exemple, et celle dâun Dante ou dâun François dâAssise. Mais mĂȘme parmi les ĂȘtres Ă©veillĂ©s il y a aussi dâĂ©normes diffĂ©rences de degrĂ©s ; il est des Ăąmes, des consciences-forces tout juste nĂ©es et dâautres qui ont une individualitĂ© dĂ©jĂ trĂšs formĂ©e ; des Ăąmes qui sont dans le premier Ă©clatement radieux de leur dĂ©couverte mais qui ne savent pas grand choses en dehors de leur joie rayonnante, qui nâont pas de souvenir prĂ©cis de leur passĂ©, mĂȘme pas conscience des mondes quâelles portent en elles. On peut ĂȘtre un yogi lumineux ou un saint qui vit dans son Ăąme et avoir un mental fruste, un vital refoulĂ©, un physique que lâon mĂ©prise. Le âsalutâ est peut-ĂȘtre rĂ©alisĂ© mais non la plĂ©nitude dâune vie intĂ©grale. A la dĂ©couverte psychique doit succĂ©der lâintĂ©gration psychique. Patiemment, lentement, aprĂšs avoir dĂ©couvert le royaume intĂ©rieur, il faudra coloniser et y adjoindre le royaume extĂ©rieur qui viendra sâintĂ©grer autour de ce nouveau centre si nous voulons une rĂ©alisation terrestre. Il faut que le psychique soit prĂ©sent Ă nos activitĂ©s extĂ©rieures et câest alors seulement que nous pourrons commencer Ă parler de rĂ©incarnation et de souvenirs des vies passĂ©es, des souvenirs de moments dâĂąme. Nous pourrons nous souvenir dâun cadre, dâun lieu, dâun costume, dâun dĂ©tail banal ce sont les seuls instants oĂč nous avons vĂ©cu, ou un vrai âjeâ a Ă©mergĂ© en nous. En des circonstances tragiques, de mĂȘme, le psychique peut Ă©merger. On sent comme une prĂ©sence derriĂšre, qui nous fait faire des choses dont nous serions tout Ă fait incapables normalement. LâĂ©volution ne consiste pas Ă devenir de plus en plus saint ou de plus en plus intelligent mais de plus en plus conscient. Malheureusement, le plus souvent, nous nous contentons âdâune vie intĂ©rieureâ dit-on et dehors nous vivons nâimporte comment, par habitude. Câest le contraire dâun yoga intĂ©gral. Mais, si dĂšs le dĂ©but, au lieu de rejeter toutes les activitĂ©s mondaines pour nous plonger dans la seule quĂȘte de lâĂąme nous avons tout embrassĂ© dans notre recherche, tous les niveaux de notre ĂȘtre, toute la vie, nous arriverons Ă une vie intĂ©grale et intĂ©grĂ©e, tandis que si lâon a tout exclu pour arriver Ă des fins dites âspirituellesâ il est trĂšs difficile de revenir sur ses pas pour dĂ©brider le mental et lâuniversaliser. La rĂ©alisation psychique ou dĂ©couverte de lâĂąme nâest donc pas une fin pour le chercheur câest le tout petit commencement seulement dâun autre voyage qui sâaccomplit dans la conscience de plus en plus vaste. Comme lâannonce Sri Aurobindo, nous aurons assez grandi pour infuser assez de conscience dans ce corps afin quâil participe, lui aussi, Ă lâimmortalitĂ© psychique. Tout et toujours, est une question de conscience, pour notre vie mentale, vitale, et physique, comme pour notre sommeil et notre mort et notre immortalitĂ©. La conscience est le moyen, la conscience est la clĂ©, la conscience est la fin. ->Sri Aurobindo ou lâaventure de la conscience â 2iĂšme partie .
Unpeu plus loin un autre bĂątiment industriel a Ă©tĂ© transformĂ© est lâancien silo de grains de Nedre Foss, sur GrĂŒner parken, datant de 1953. Câest depuis 1999, une rĂ©sidente Ă©tudiante. La suite de la ballade est bucolique le long de lâAkerselva avec des torrents aux dĂ©bits impressionnants faisant dâOslo, une capitale unique dans le monde. Si on continue la Ce recueil, publiĂ© en 1558, au retour de du Bellay en France, aprĂšs un sĂ©jour de quatre ans Ă Rome, comprend 32 sonnets en dĂ©casyllabes et en alexandrins, dont voici la liste N° sonnet Incipit sujet Au roi DĂ©dicace Ă Henri II 1 Divins esprits, dont la poudreuse cendre... Invocation aux esprits des poĂštes antiques 2 Le Babylonien ses hauts murs vantera... Sujet glorification de Rome 3 Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome Rome, en ruine, vaincue par le temps 4 Celle qui de son chef les Ă©toiles passait Le corps de Rome Ă©crasĂ© sous les sept collines 5 Qui voudra voir tout ce qu'ont pu nature... Le corps de Rome est mort, restent ses Ă©crits 6 Telle que dans son char la BĂ©rĂ©cynthienne grandeur passĂ©e de Rome 7 SacrĂ©s coteaux, et vous saintes ruines Les monuments de Rome vaincus par le temps 8 Par armes et vaisseaux Rome dompta le monde grandeur passĂ©e de Rome 9 Astres cruels, et vous dieux inhumains Rome est mortelle, le monde aussi 10 Plus qu'aux bords AetĂ«ans le brave fils d'Ăson Rome victime des guerres civiles 11 Mars, vergogneux d'avoir donnĂ© tant d'heur victoire provisoire des barbares 12 Tels que l'on vit jadis les enfants de la Terre La chute de Rome comparĂ©e Ă la dĂ©faite des Titans 13 Ni la fureur de la flamme enragĂ©e Rome en ruine continue d'Ă©merveiller le monde 14 Comme on passe en Ă©tĂ© le torrent sans danger Les Barbares jadis soumis insultent Rome aujourd'hui 15 PĂąles esprits, et vous ombres poudreuses Invocation des mĂąnes des anciens Romains qui assistent Ă la ruine de Rome. 16 Comme l'on voit de loin sur la mer courroucĂ©e Les tempĂȘtes les plus violentes s'Ă©puisent, comme la puissance romaine. 17 Tant que l'oiseau de Jupiter vola L'oiseau de Jupiter a laissĂ© place Ă la "corneille germaine" 18 Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois... Cycle de l'histoire des bergers Ă l'empire, puis au "pasteur" chrĂ©tien retour au commencement. 19 Tout le parfait dont le ciel nous honore Rome contenait le bien et le mal ; en mourant, elle nous a laissĂ© le mal mythe de Pandore 20 Non autrement qu'on voit la pluvieuse nue Cycle de l'eau Rome de mĂȘme montre par son histoire que tout retourne au nĂ©ant. cf. 18 21 Celle que Pyrrhe et le Mars de Libye Rome a vaincu le monde, mais s'est vaincue elle-mĂȘme 22 Quand ce brave sĂ©jour, honneur du nom latin Rome vaincue par elle-mĂȘme est une image du monde, qui reviendra au Chaos originel. 23 O que celui Ă©tait cautement sage Rome victime des guerres civiles 24 Si l'aveugle fureur, qui cause les batailles Rome victime des guerres civiles 25 Que n'ai-je encor la harpe thracienne Le poĂšte peut faire revivre Rome 26 Qui voudrait figurer la romaine grandeur La grandeur de Rome couvre le monde entier 27 Toi qui de Rome Ă©merveillĂ© contemples La Rome moderne cherche Ă ressusciter la Rome antique 28 Qui a vu quelquefois un grand chĂȘne assĂ©chĂ© La Rome antique plus honorĂ©e que des citĂ©s plus rĂ©centes 29 Tout ce qu'Ăgypte en pointe façonna Rome a rassemblĂ© l'art du monde entier et elle est son tombeau 30 Comme le champ semĂ© en verdure foisonne Cycle de l'histoire grandeur et dĂ©cadence. 31 De ce qu'on ne voit plus qu'une vague campagne Rome victime de la guerre civile 32 EspĂ©rez-vous que la postĂ©ritĂ© Le poĂšte ne peut espĂ©rer une gloire immortelle, mais il est le premier Français Ă avoir chantĂ© Rome. Composition et thĂšmes du recueil La liste ci-dessus montre Ă l'Ă©vidence qu'il serait bien difficile de dĂ©finir une composition prĂ©cise du recueil les thĂšmes alternent, s'entremĂȘlent, dans une composition contrapunctique. Toutefois, l'on peut repĂ©rer des thĂšmes, et des effets d'Ă©cho Glorification de Rome Rome, citĂ© exceptionnelle, a dominĂ© le monde sonnet 2, par les arts et par les armes sonnets 6 et 7 ; bien qu'en ruine, elle Ă©merveille le monde entier sonnet 13 ; sa grandeur couvre le monde entier sonnet 26 ; elle est plus honorĂ©e aujourd'hui que des citĂ©s plus rĂ©centes et plus florissantes sonnet 28, elle a rassemblĂ© l'art du monde entier, et elle constitue son tombeau sonnet 29. L'on remarquera que la seule Rome qui soit glorifiĂ©e, c'est la Rome antique, et non la capitale de la chrĂ©tientĂ© ; ce qui nous amĂšnera Ă nous demander ce qu'Ă©tait Rome dans la seconde moitiĂ© du XVIĂšme siĂšcle, et naturellement Ă faire le lien avec la Rome contemporaine que dĂ©crivent les Regrets. La Rome prĂ©sente, humiliĂ©e Rome n'est plus qu'un corps mort, Ă©crasĂ© sous les sept collines sonnet 4, mais dont il reste le tĂ©moignage des Ă©crivains sonnet 5 les Barbares ont remportĂ© une victoire provisoire sonnet 11, ils insultent Rome sonnet 14, et l'oiseau de Jupiter a cĂ©dĂ© la place Ă la "corneille germaine" sonnet 17 Rome a Ă©tĂ© victime d'elle-mĂȘme, de ses propres guerres civiles Ce thĂšme est rĂ©current, et essentiel dans le recueil ; en 1558, les premiers affrontement de la guerre civile en France ont Ă©clatĂ©. On le retrouve dans le sonnet 10, le sonnet 12 la chute de Rome est comparĂ©e Ă la dĂ©faite des Titans contre Jupiter, les sonnet 21, 23, 24 et 31. Une mĂ©ditation sur l'Histoire La conception de l'Histoire qui ressort de ce recueil est double tout d'abord, la chute de Rome apparaĂźt comme la punition d'une faute hybris excessive qui a dĂ©plu aux Dieux sonnet 12, ou triste rĂ©sultat des guerres civiles. Mais elle apparaĂźt aussi comme une fatalitĂ©, liĂ©e au temps sonnets 3 et 7 ; les mĂąnes des anciens Romains ne peuvent que constater sa ruine inĂ©vitable sonnet 15. Tout ce qui est grand finit par s'Ă©puiser sonnet 16 ; et le sens de l'Histoire descend vers la chute Rome, qui contenait le bien et le mal, en mourant ne nous a laissĂ© que le mal sonnet 19 L'Histoire semble finalement se prĂ©senter sous la forme d'un cycle sonnet 18 le "pasteur" d'aujourd'hui, le pape, est un retour aux humbles bergers du commencement, sonnets 20 et 30. Rome est Ă l'image du monde tout entier, qui, comme elle, retournera au nĂ©ant, au Chaos originel sonnets 9 et 22 Le rĂŽle du poĂšte Du Bellay est assez peu prĂ©sent dans ce recueil, sinon sous la forme gĂ©nĂ©rique du poĂšte. Il n'en est pas moins une figure essentielle, puisqu'il l'ouvre et le clĂŽt, introduisant ainsi une structure cyclique. Dans la dĂ©dicace "Au roi", le sonnet 25 et enfin le sonnet final, il affirme qu'il fait revivre la Rome antique, et qu'il est le premier Français Ă le faire, et dans le premier sonnet, il invoque ses pairs, les poĂštes antiques â sans les nommer. Et dĂšs le 2Ăšme sonnet, il entre dans le vif du sujet, en glorifiant Rome. Mais cette gloire et cette rĂ©surrection ne sont que provisoires le poĂšte ne peut espĂ©rer contrairement Ă ce qu'affirmait Ronsard une gloire immortelle... Sonnet 14 "Comme on passe en Ă©tĂ©..." Le quatorziĂšme sonnet du recueil appartient Ă la sĂ©rie de ceux qui dĂ©peignent Rome humiliĂ©e, insultĂ©e par les "Barbares" qui l'ont conquise ; c'est presque la seule image de la Rome contemporaine que nous ayons. La composition est claire une triple comparaison introduite par "comme", et comprenant respectivement 4, 4 et 2 vers, suivie d'une "apodose" plus brĂšve "ainsi..." oĂč apparaĂźt enfin le sujet de la comparaison Rome. Cette composition recouvre exactement la structure du sonnet deux quatrains Ă rime embrassĂ©e, un distique Ă rime plate, et un dernier quatrain Ă rimes croisĂ©es. 1er quatrain comparaison naturelle, issue de l'observation de la nature mĂ©diterranĂ©enne le contraste entre la vigueur, et la violence des torrents l'hiver, et le fait que l'Ă©tĂ© les trouve Ă sec. Trois vers pour la violence, un seul pour la faiblesse ; l'Ă©volution semble plutĂŽt favorable, et l'on s'identifie au piĂ©ton qui traverse Ă guĂ© la riviĂšre. Mais dĂ©jĂ , le torrent est humanisĂ© par les termes "roi" et "hautaine". Le second quatrain est une allusion Ă la fable de PhĂšdre I, 21, "Le lion devenu vieux, le sanglier, le taureau et l'Ăąne", qui sera reprise par La Fontaine III, 14. La condamnation se fait plus vive ; le lecteur est invitĂ© Ă plaindre le lion et Ă condamner les "couards animaux" ; l'horreur "ensanglanter leurs dents" le dispute Ă l'indignation "couards ~ courageux", "audace vaine".... L'arĂšne = le sable sur lequel gĂźt le Lion Ă©voque dĂ©jĂ les jeux du cirque, donc Rome... Le distique central fait allusion Ă la mort d'Hector, et aux injures que son corps subit, dans l'Iliade. La mention des "moins vaillants des Grecs" est peut-ĂȘtre aussi une rĂ©fĂ©rence au traditionnel mĂ©pris des Romains pour les Grecs... des Romains qui se croyaient descendants des Troyens. La colĂšre est Ă son comble. Enfin, le quatrain final reprend le terme "soulaient" du premier la boucle est bouclĂ©e. "Ceux qui..." sont les Barbares vaincus, souvent rĂ©duits en esclavage cf. la Guerre des Gaules et qui ont dĂ©ferlĂ© sur Rome Ă partir du IIIĂšme siĂšcle aprĂšs J-C. Cf. l'Histoire de Rome. La situation s'est inversĂ©e, comme au premier quatrain ; allusion sans doute au pillage auquel se livrent les courtisans et le Pape pour construire leurs propres palais, transformant la Rome antique en carriĂšre... "Quod non fecerant barbari, fecit Barberini" disait-on ironiquement Ă Rome, Ă propos d'Urbain VIII Barberini, grand bĂątisseur... et dĂ©molisseur 1623-1644 ! Le dernier vers est un chiasme, qui oppose "osent ~ dĂ©daigner" et surtout "vaincus ~ vainqueurs" quoi qu'ils fassent, les vaincus d'hier restent des vaincus, aux yeux de Du Bellay. La veine satirique des Regrets est ici perceptible. BĂTISSEURSDE L'ANCIEN MONDE was live. BĂTISSEURS DE L'ANCIEN MONDE was live. Jump to. Sections of this page. Accessibility Help. Press alt + / to open this menu. 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